• Poème de Nizar Kabbani: BELKIS

     

    Merci à vous,

    Merci à vous,

    Assassinée, ma bien aimée !

    Vous pourrez dès lors

    Sur la tombe de la martyre

    Porter votre funèbre toast.

    Assassinée ma poésie !

    Est-il un peuple au monde,

    -Excepté nous-

    Qui assassine le poème ?

     

    O ma verdoyante Ninive !

    O ma blonde bohémienne !

    O vagues du Tigre printanier !

    O toi qui portes aux chevilles

    Les plus beaux des anneaux !

     

    Ils t'ont tuée, Balkis !

    Quel peuple arabe

    Celui-là qui assassine

    Le chant des rossignols !

     

    Balkis, la plus belle des reines

    Dans l'histoire de Babel !

    Balkis, le plus haut des palmiers

    Sur le sol d'Irak !

     

    Quand elle marchait

    Elle était entourée de paons,

    Suivie de faons.

     

    Balkis, ô ma douleur !

    O douleur du poème à peine frôlé du doigt !

    Est-il possible qu'après ta chevelure

    Les épis s'élèveront encore vers le ciel ?

     

    Où est donc passé Al Samaw'al ?

    Où est donc parti Al Muhalhil ?

    Les anciens preux, où sont-ils ?

     

    Il n'y a plus que des tribus tuant des tribus,

    Des renards tuant des renards,

    Et des araignées tuant d'autres araignées.

    Je te jure par tes yeux

    Où viennent se réfugier des millions d'étoiles

    Que, sur les Arabes, ma lune,

    Je raconterai d'incroyables choses

    L'héroïsme n'est-il qu'un leurre arabe ?

    Ou bien, comme nous, l'Histoire est-elle mensongère ?

    Balkis, ne t'éloigne pas de moi

    Car, après toi, le soleil

    Ne brille plus sur les rivages.

     

    Au cours de l'instruction je dirai :

    Le voleur s'est déguisé en combattant,

    Au cours de l'instruction je dirai :

    Le guide bien doué n'est qu'un vilain courtier.

     

    Je dirai que cette histoire de rayonnement (arabe)

    N'est une plaisanterie, la plus mesquine,

    Voilà donc toute l'Histoire, ô Balkis !

     

    Comment saura-t-on distinguer

    Entre les parterres fleuris

    Et les monceaux d'immondices ?

     

    Blakis, toi la martyre, toi le poème,

    Toi la toute-pure, toit la toute-sainte.

    Le peuple de Saba, Balkis, cherche sa reine des yeux,

    Rends donc au peuple son salut !



     

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