• Soeur Emmanuelle: J’ai douté de l’existence de Dieu

    J’ai douté de l’existence de Dieu

    -  Vous dites souvent qu’il ne faut pas toujours tout compliquer. Certes. Mais vous avez quand même connue des difficultés. Tout à l’heure, vous disiez que, contrairement à sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, vous n’avez pas de « trous noirs »,  de difficultés à prier.

    Mais vous est-il arrivé de douter de l’existence de Dieu. ?

    - Sœur Emmanuelle : Oui. Mais alors, je continuais à prier. Je demandais l’aide du Seigneur. Mon cœur croyait toujours. C’était mon esprit qui me posait des questions.

    - Vous en avez parlé quand a été publié un livre, en septembre 2007, qui réunissait des lettres de Mère Teresa à Calcutta, lettres dans lesquelles elle disait avoir été torturée pendant cinquante ans par le doute.

    - Sœur Emmanuelle : Oui, une journaliste est venue m’interroger pour me demander ce que j’en pensais et si j’avais douté moi aussi. Je lui ai répondu que cela m’était arrivé, une crise de deux ans, alors que je suivais des études de philosophie à l’université d’Istanbul. Et bien entendu, cela fut repris un peu partout. Quand on est médiatisée…et la réponse à ce doute, je l’ai trouvée dans Pascal.

    - Pouvez-vous nous expliquez ?

    - Sœur Emmanuelle : Je souhaitais étudier davantage, j’avais un grand appétit de connaissances, mais j’étais soumise à une autre urgence : je voulais aider les enfants pauvres. Quand je suis sortie du noviciat, la Supérieure générale de la congrégation m’a proposé de poursuivre des études en Sorbonne. J’ai refusé. J’étais plus attirée par la perspective d’aller enseigner dans cette petite école de Turquie.

         Voilà qu’on finit par m’affecter au collège. Là, j’ai compris qu’il fallait approfondir mes connaissances. Mais c’était la guerre, la deuxième bien sûr. Pas question d’aller en Sorbonne ! Toute idée de voyage jusqu’à Paris occupé était complètement farfelue. Je me suis donc inscrite à l’université turque où existait une licence de lettres, bien sûr. Par la suite, mes études ont été un peu chahutées, au gré d’événements divers : mon envoie en Tunisie notamment. J’ai quand même fini par obtenir ma licence à Paris. Mais presque à l’âge où certains professeurs prennent leur retraite. Passons.

    La crise dont je voulais parler, et qui fut rude, avait éclaté auparavant, à Istanbul. Des professeurs de grande qualité existaient dans cette université. Des personnages d’une formidable rigueur, intellectuelle, spirituelle ou morale.

    L’un était juif et n’avait que Moïse pour référence, l’autre musulman qui, bien sûr, citait Mahomet. Et moi, jusque-là, je ne m’étais vraiment intéressée qu’à Jésus, même si je connaissais un peu l’Ancien Testament. Ce fut un choc. Je l’avais dit déjà il y a mal d’années.

    - Un choc d’autant plus important que vous aviez engagé toute votre vie dans la foi

    - Sœur Emmanuelle : Exactement. Bien des gens abandonnent tout ou presque après catéchisme. Surtout aujourd’hui, dans un monde déchristianisé. Mais moi, j’avais consacré ma vie au Christ. Pour moi, c’était le seul amour durable, éternel. Mais si je m’étais trompée ? Patatras. J’aurais bâti m vie sur illusion ? Je me suis mise à lire, à lire, à lire et à relire bien des philosophes anciens ou plus actuels, chinois ou européens. Mais je n’avançais pas. Bien entendu, la lecture des Evangiles me réchauffait le cœur. Mais bon, la question c’était l’Incarnation : Jésus, Dieu fait homme. Alors, des philosophes je suis passée aux théologiens. Par exemple, à Thomas d’Aquin, le dominicain. Très passionnant, Thomas d’Aquin. Mais pas tout à fait convaincant pour moi, en tout ca avec ses cinq preuves de l’existence de Dieu. Et figurez-vous que je suis arrivée à Pascal. Presqu’une révélation…

    - Jean-Paul II, dans son encyclique sur la raison et la foi, ne l’appelle pas théologien mais philosophe.

    - Sœur Emmanuelle : Appelez-le comme vous voudrez : cela ne change pas grand-chose de ranger els gens dans des catégories toutes faites.

    Moi, j’ai découvert Pascal quand je suis arrivée à la Sorbonne. C’était au programme. Naturellement, j’ai lu ses Pensées. Vous devriez les lire pour échapper à l’enfermement de « la raison raisonnante ».

    Vous parlez toujours de la raison raisonnante, mais vous devez vous expliquez un peu plus clairement sur cette expression.

    - Sœur Emmanuelle : Attendez. Pour Pascal, on ne peut pas atteindre Dieu uniquement par la raison. Il est le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob

    Et de Jésus.

    - Sœur Emmanuelle : Attendez. C'est-à-dire qu’il est le Dieu qui se révèle à l’homme. La révélation par Jésus étant la plus complète. Pascal dit : « C’est le cœur qui sent Dieu, et non la raison. » Voilà ce qu’évoque la foi, Dieu sensible au cœur et non à la raison.

    - En fait, pour vous, la raison peut nos avertir de ce qu’il ne convient pas de faire, mais c’est le cœur qui nous dit ce qu’il faut faire ?

    - Sœur Emmanuelle : Vous avez à peu près compris !

     

    Sœur Emmanuelle,

     Jacques Duquesne, Annabelle Cayrol,

    « J'ai 100 ans et je voudrai vous dire..., Plon »



     



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  • Commentaires

    1
    Vendredi 12 Décembre 2008 à 17:12
    quand j'ai perdu ma fille j'ai aussi douté samia puis c'est revenu ^passe une bonne soirée gros bisous didier
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