• Les Fleurs du Mal 1890 d’Odilon Redon

    Sans cesse à mes côtés s'agite le Démon;


    La Destruction

     


    Sans cesse à mes côtés s'agite le Démon;

    Nage autour de moi comme un air impalpable;

    Je l'avale et le sens qui brûle mon poumon

    Et l'emplit d'un désir éternel et coupable.

     

    Parfois il prend, sachant mon grand amour de l'Art,

    La forme de la plus séduisante des femmes,

    Et, sous de spécieux prétextes de cafard,

    Accoutume ma lèvre à des philtres infâmes.

     

    Il me conduit ainsi, loin du regard de Dieu,

    Haletant et brisé de fatigue, au milieu

    Des plaines de l'Ennui, profondes et désertes,

     

    Et jette dans mes yeux pleins de confusion

    Des vêtements souillés, des blessures ouvertes,

    Et l'appareil sanglant de la Destruction!

     

    Charles Baudelaire

    Les Fleurs du mal

     

               




    1 commentaire
  • Les Fleurs du Mal 1890 d’Odilon Redon

    Sur le fond de mes nuits Dieu de son doigt savant

    Dessine un cauchemar multiforme et sans trêve.

      « Le Gouffre », Les Fleurs du Mal

     

    Pascal avait son gouffre, avec lui se mouvant.

    – Hélas ! Tout est abîme, – action, désir, rêve,

    Parole ! Et sur mon poil qui tout droit se relève

    Maintes fois de la Peur je sens passer le vent.

    En haut, en bas, partout, la profondeur, la grève,

    Le silence, l'espace affreux et captivant...

    Sur le fond de mes nuits Dieu de son doigt savant

    Dessine un cauchemar multiforme et sans trêve.

    J'ai peur du sommeil comme on a peur d'un grand trou,

    Tout plein de vague horreur, menant on ne sait où ;

    Je ne vois qu'infini par toutes les fenêtres,

    Et mon esprit, toujours du vertige hanté,

    Jalouse du néant l'insensibilité.

    Ah ! Ne jamais sortir des Nombres et des Êtres !

     

    Charles Baudelaire

    Les Fleurs du mal




    1 commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique