• Banaz Mahmod a été violée et frappée à coups de pieds pendant deux heures avant d'être étranglée par une cordelette



    Début 2005, Banaz Mahmod met un terme à son mariage arrangé par sa famille kurde originaire d'Irak, arrivée à Londres en 1998, quand elle avait 11 ans, et s'enfuit. Son père lui enjoint de revenir à la maison sinon, précise-t-il sur la cassette audio qu'il lui envoie, il tuera sa mère et ses sœurs avant de mettre un terme à ses propres jours. Elle s'exécute.
    Peu après, agressée par son frère, elle est hospitalisée. Le frère a été payé par son père pour l'achever mais n'a pas pu aller au bout de la « mission ». De retour à la maison familiale, son père lui reproche de mettre de la laque et de s'occidentaliser ; il la bat assez régulièrement.
    Entre-temps, elle a rencontré Rahmat Suleimani, Kurde iranien, ce qui accru la colère de la famille - Rahmat Suleimani ne vient pas du même village que les Mahmod. L'oncle paternel de Banaz Mahmod, Ari Mahmod, lui dira un jour « Eut-elle été sa fille, elle eut été réduite en cendres, pour avoir couvert de honte sa famille en se compromettant avec un Kurde iranien »...
    Dernier trimestre 2005, les 2 frères Mahmod réunissent un conseil de famille et, avec 4 de leurs proches, mâles, décident de mettre un terme au « scandale » ; ils commencent à planifier la mise à mort de la « coupable ».
    A la toute fin de l'année 2005, Banaz Mahmod est attirée dans l'appartement de sa grand-mère par son père, qui porte des gants et la force à avaler du cognac. Craignant pour sa vie, elle casse une vitre, s'échappe et se retrouve de nouveau à l'hôpital. Le policier auquel elle fait part de ses suspicions concernant les intentions de son père, les ignore et envisage de la poursuivre pour bris de glace...
    Plus tard, elle enverra une lettre à la Police, réitérant ses craintes vis-à-vis de son père et de son oncle, lettre dont la Police ne tiendra aucun compte.
    A sa sortie de l'hôpital, elle retourne à la maison familiale et convainc sa famille qu'elle a rompu ses relations avec Rahmat Suleimani. Mais un ami de la famille Mahmod aperçoit le couple dans la rue, le 22 janvier 2006...
    Quelques jours après, plusieurs individus essaient de faire monter de force Rahmat Suleimani dans une voiture, ce qu'il refuse. L'incident détermine Banaz Mahmod à se rendre, de nouveau, dans un commissariat. Cette fois, les policiers tentent de la persuader de chercher refuge dans un foyer, mais elle refuse, convaincue que sa mère la protègera.
    Le lendemain, le père et la mère laissent leur fille seule à la maison. Le temps passe, Banaz Mahmod ne donne pas signe de vie. Rahmat Suleimani s'en inquiète et alerte la Police.
    Début mai 2006, sur la foi d'indices recueillis lors d'écoutes téléphoniques, la Police retrouve le corps de Banaz Mahmod dans une valise, enterrée dans un jardin. Elle a été étranglée avec un lacet.
    11 juin 2007. Après un procès de 3 mois, le père de Banaz Mahmod est reconnu coupable du meurtre de sa fille par un tribunal londonien. Le policier « sceptique » fait l'objet de poursuites.

    Par Richard Zrehen

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  • Assassinée par ses frères car elle vivait comme une allemande

    Le meurtre par ses frères d'une jeune Turque émancipée provoque émoi et indignation:
    elle avait 23 ans, un fils, un diplôme d'électricienne, des petits amis. Une vie somme toute ordinaire dans le Berlin cosmopolite et branché de 2005. Elle en est morte. Tuée un soir de février, de plusieurs balles dans la tête, à un arrêt de bus, le long d'une avenue déserte de la capitale allemande.

    Trois de ses frères, âgés de seulement 18 à 25 ans, ont été arrêtés quelques jours plus tard, accusés du meurtre de leur soeur, soupçonnés d'avoir commis un «crime d'honneur» pour «laver» l'affront subi par leur famille qui ne supportait pas de voir la jeune Turque vivre librement. Hatin Sürücü fait partie des 5 000 victimes de crimes d'honneur recensés chaque année par l'ONU.

    Elevée à Berlin dans une famille stricte originaire d'Anatolie, Hatin a été contrainte à 16 ans de retourner en Turquie pour épouser l'un de ses cousins. De cette union forcée naît rapidement un petit garçon, qu'elle emmènera dans ses bagages lorsqu'un an après elle décide de retourner, seule, à Berlin. Hatin est prise en charge par un centre d'accueil pour les mères célibataires qui lui fournit un logement et lui permet d'achever ses études. Ses amis évoquent une jeune femme drôle et souriante, qui aimait sortir et s'amuser qui avait décidé de ne plus porter le voile, qui vivait comme les Allemandes de son âge.

    Son meurtre a suscité émoi et indignation outre-Rhin, en particulier à Berlin, où la communauté turque est importante. Surtout, c'est le cinquième crime du genre depuis octobre dans la capitale. «Hatin Sürücü est morte selon toute vraisemblance parce que le conseil de famille s'est réuni et a décidé de sa mort», s'indigne le quotidien de gauche Taz.

    Avec des bouquets de fleurs, des bougies et des photos de la jeune mère, plus d'une centaine de personnes se sont réunies le 22 février à l'arrêt du bus de la ligne 246, dans le quartier de Tempelhof où vivent nombre d'immigrés.

    «Il n'y a aucune justification, qu'elle soit religieuse ou culturelle, à la violence contre les femmes et les enfants», s'emporte Serap Cileli, auteure remarquée en Allemagne de Nous sommes vos filles, pas votre honneur.

    Les sociaux-démocrates locaux réclament que le 7 février, jour du meurtre de la jeune femme, devienne à Berlin une journée du souvenir des femmes victimes de violences conjugales. Et l'Allemagne s'écharpe à nouveau sur la coexistence multiculturelle après l'inextricable question du port du foulard à l'école qui a agité le pays des mois durant.

    «Ces crimes d'honneur dans les populations immigrées sont aussi le signe d'une intégration ratée», estime ainsi Lale Akgün de l'association Terre des femmes, qui se bat contre les violences faites aux femmes. Longtemps, la peur de paraître xénophobe dans un pays hanté par ses démons du passé a empêché l'Allemagne de discuter immigration et surtout intégration. Elle se réveille aujourd'hui avec la gueule de bois.

    Par Jean RYGA
    mardi 01 mars 2005 (Liberation - 06:00)

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