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Par fathianasr le 31 Janvier 2009 à 12:15
le dessein est de YANN, voir Le blog de YannBBlues Link
Tu m'as trouvé
Tu m'as trouvé comme un caillou que l'on ramasse sur la plage
Comme un bizarre objet perdu dont nul ne peut dire l'usage
Comme l'algue sur un sextant qu'échoue à terre la marée
Comme à la fenêtre un brouillard qui ne demande qu'à entrer
Comme le désordre d'une chambre d'hôtel qu'on n'a pas faite
Un lendemain de carrefour dans les papiers gras de la fête
Un voyageur sans billet assis sur le marchepied du train
Un ruisseau dans leur champ détourné par les mauvais riverains
Une bête des bois que les autos ont prise dans leurs phares
Comme un veilleur de nuit qui s'en revient dans le matin blafard
Comme un rêve mal dissipé dans l'ombre noire des prisons
Comme l'affolement d'un oiseau fourvoyé dans la maison
Comme au doigt de l'amant trahi la marque rouge d'une bague
Une voiture abandonnée au milieu d'un terrain vague
Comme une lettre déchirée éparpillée au vent des rues
Comme le hâle sur les mains qu'a laissé l'été disparu
Comme le regard égaré de l'être qui voit qu'il s'égare
Comme les bagages laissés en souffrance dans une gare
Comme une porte quelque part ou peut-être un volet qui bat
Le sillon pareil du cœur et de l'arbre où la foudre tomba
Une pierre au bord de la route en souvenir de quelque chose
Un mal qui n'en finit pas plus que la couleur des ecchymoses
Comme au loin sur la mer la sirène inutile d'un bateau
Comme longtemps après dans la chair la mémoire du couteau
Comme le cheval échappé qui boit l'eau sale d'une mare
Comme un oreiller dévasté par une nuit de cauchemars
Comme une injure au soleil avec de la paille dans les yeux
Comme la colère à revoir que rien n'a changé sous les cieux
Tu m'as trouvé dans la nuit comme une parole irréparable
Comme un vagabond pour dormir qui s'était couché dans l'étable
Comme un chien qui porte un collier aux initiales d'autrui
Un homme des jours d'autrefois empli de fureur et de bruit
Louis Aragon (‘Le roman inachevé ‘, 1956)
3 commentaires -
Par fathianasr le 31 Janvier 2009 à 11:11
Marc CHAGALL : "Les amoureux Au-dessus de la ville"
Ecoute…
Ecoute, apprendras-tu à m’écouter de loin,
Il s’agit de pencher le cœur plus que l’oreille,
Tu trouveras en toi des ponts et des chemins
Pour venir jusqu’à moi qui regarde et qui veille.
Qu’importe en sa longueur l’Océan Atlantique,
Les champs, les bois, les monts qui sont entre nous deux,
L’un après l’autre un jour il faudra qu’ils abdiquent
Lorsque de ce côté tu tourneras les yeux.
Jules Supervielle
(« Le forçat innocent », 1930)
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