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     « Le Chant du soleil » de Djalâl ud-Dîn Rûmî


    Dans le cœur des amants qui boivent la lie, brûlent les désirs ardents.

    Dans le for intérieur des sages au cœur sombre, il y a des réfutations.

     

    La raison dit: "Ne pose pas ici le pied, car dans l'anéantissement, il n'y a que des épines."

    L'amour répond à la raison: "C'est en toi-même que se trouvent les épines."

     

    Oh! Reste silencieux, arrache l'épine de l'existence de ton cœur,

    Afin de découvrir dans ta propre âme des roseraies,

     

    Ô Sham Tabrîzî! Tu es le soleil caché dans les nuages des lettres.

    Quand ton soleil s'est levé, se sont effacées les paroles.

     

    Je suis devenu comme une prière par tant de prières que j'ai faites;

    Quiconque voit mon visage me demande de prier pour lui.

     

    Mais à tes yeux, j'ai la couleur des impies,

    Car tes yeux qui tuent sans merci quand ils me voient cherchent la guerre.

     

    Si la séparation d'avec toi me tue, je lui pardonne:

    Quel prix du sang peut réclamer à celui qui le tue

     

    Le captif mis à mort dans la guerre sainte?

    Je t'ai salué, je t'ai prêté un serment d'allégeance, Tu m'as dit: "Comment es-tu?"

     

    Je suis dans l'état du pauvre cuivre qui appelle la pierre philosophale.

    Le portrait est tel que l'a fait le peintre;

     

    Le corps blessé est tel qu'il réclame le remède.

    Que tes paroles ne soient pas comme l'ombre devant le soleil!

     

    Les poussière s'enfuient de l'ombre et cherchent un rayon de lumière.

    Oh! la générosité et la bienfaisance de Shams de Tabrîz!

     

    Le soleil de la voûte azurée lu réclame un don.

    Celui à qui s'est dévoilé le mystère de l'amour,

     

    Celui-là n'est plus, car il s'est effacé dans l'amour.

    Place devant le soleil la chandelle ardente

     

    Et vois comme son éclat disparaît devant ces lumières:

    La chandelle n'existe plus, la chandelle s'est transmuée en lumière.

     

    Il n'y a plus de signes d'elle, elle-même est devenue signe.

    Il ne va de même pour du feu corporel dans la lumière de l'esprit:

     

    Il ne reste pas feu, il devient cette flamme.

    Le ruisseau court à la recherche de l'océan;

     

    Il se perd quand il s'est noyé dans l'océan.

    Tant que la recherche existe, le cherché n'est pas connu;

     

    Quand l'objet de la recherche est atteint, cette recherche devient vaine.

    Donc, tant que la recherche existe, cette quête est imparfaite.

     

    Quant la recherche n'est plus, elle acquiert alors la suprématie.

    Tout être sans amour qui cherche un turban

     

    Est dépourvu de tête ne sont alors pour lui qu'une épine.

    Comme moi, il est devenu, dans la passion qu'inspire Shams-od-Dîn,

    Celui qui dans son cœur recèle tous ces secrets.

     

     

    « Le Chant du soleil » de Rûmî,

     

    Eva de Vitray-Meyerovitch, spécialiste de l'Islam et traductrice de Rûmî, ouvre les portes de cet enseignement de soufisme du grand poète mystique de L’Islam Djalâl-od-Dîn-Rûmî (1207-1273). Son œuvre exprime l'essence même du soufisme et est tout entière consacrée à la "nostalgie du divin", à la célébration d'un amour "terrestre en apparence", mais "qui est en réalité une hypostase de l'amour divin". Elle en acquiert une portée universelle.

     

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  • Parabole de l'éléphant

     

    Différend au sujet de sa description et de sa forme.

    Des Indous avaient amené un éléphant; ils l'exhibèrent dans une maison obscure.

    Plusieurs personnes entrèrent, une par une, dans le noir, afin de le voir.

    Ne pouvant le voir des yeux, ils le tâtèrent de la main.

    L'un posa la main sur sa trompe; il dit : « Cette créature est telle un tuyau d'eau. »

    L'autre lui toucha l'oreille : elle lui apparut semblable à un éventail.

    Lui ayant saisi la jambe, un autre déclara : « L'éléphant a forme de pilier. »

    Après lui avoir posé la main sur le dos, un autre dit : « En vérité, cet éléphant est comme un trône. »

    De même, chaque fois que quelqu'un entendait une description de l'éléphant, il la comprenait d'après la partie qu'il avait touchée.

    Leurs affirmations variaient selon ce qu'ils avaient perçu l'un l'appelait dal, l'autre alîf.

    Si chacun d'eux avait été muni d'une chandelle, leurs paroles n'auraient pas différé.

    L'œil de la perception est aussi limité que la paume de la main qui ne pouvait cerner la totalité (de l'éléphant).

    L'œil de la mer est une chose, l'écume en est une autre; délaisse l'écume et regarde avec l'œil de la mer.

    Jour et nuit, provenant de la mer, se meuvent les flocons d'écume; tu vois l'écume, non la mer. Que c'est étrange! Nous nous heurtons les uns contre les autres comme des barques; nos yeux sont aveuglés; l'eau est pourtant claire. O toi qui t'es endormi dans le bateau du corps, tu as vu l'eau; contemple l'Eau de l'eau.

    L'eau a une Eau qui la pousse, l'esprit un Esprit qui l'appelle               

     

    Djalâl ud-Dîn Rûmî

     


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