• MELANCHOLIA

    A Ernest Boutier.

    IV

    VOEU

    Paul Verlaine 

     

    Ah! les oaristys! les premières maîtresses!

    L'or des cheveux, l'azur des yeux, la fleur des chairs,

    Et puis, parmi l'odeur des corps jeunes et chers,

    La spontanéité craintive des caresses!

     

    Sont-elles assez loin toutes ces allégresses

    Et toutes ces candeurs! Hélas! toutes devers

    Le Printemps des regrets ont fui les noirs hivers

    De mes ennuis, de mes dégoûts, de mes détresses!

     

    Si que me voilà seul à présent, morne et seul,

    Morne et désespéré, plus glacé qu'un aïeul,

    Et tel qu'un orphelin pauvre sans soeur aînée.

     

    O la femme à l'amour câlin et réchauffant,

    Douce, pensive et brune, et jamais étonnée,

    Et qui parfois vous baise au front, comme un enfant


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  • MELANCHOLIA

    A Ernest Boutier.

    III

    APRÈS TROIS ANS

    Paul Verlaine 


    Ayant poussé la porte étroite qui chancelle,

    Je me suis promené dans le petit jardin

    Qu'éclairait doucement le soleil du matin,

    Pailletant chaque fleur d'une humide étincelle.

     

    Rien n'a changé. J'ai tout revu: l'humble tonnelle

    De vigne folle avec les chaises de rotin...

    Le jet d'eau fait toujours son murmure argentin

    Et le vieux tremble sa plainte sempiternelle.

     

    Les roses comme avant palpitent; comme avant,

    Les grands lys orgueilleux se balancent au vent.

    Chaque alouette qui va et vient m'est connue.

     

    Même j'ai retrouvé debout la Velléda,

    Dont le plâtre s'écaille au bout de l'avenue.

    —Grêle, parmi l'odeur fade du réséda.


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